14 ans après la création de cette lecture avec Patrice Chéreau, Dominique Blanc remonte sur scène pour interpréter le texte de Marguerite Duras. Sa voix est grave, sa silhouette peu apprêtée, elle est pâle. Sur le plateau nu, plongé dans le noir, une rangée de chaises de bistrot à jardin et une simple table et deux chaise à cour. Le dépouillement du décor est à l’image de la langue ; simple, presque ordinaire. Mais c’est avec ces modestes moyens que la comédienne nous entraîne dans le récit d’une attente qui confère à la folie. L’attente du retour de Robert L. (Robert Antelme) mari de Marguerite Duras prisonnier à Dachau. Pour conjurer le temps, elle vide son sac, ouvre ses cahiers et range ses crayons, se lève, enfile son manteau et part pour la gare d’Orsay où les prisonniers arrivent par trains entiers d’Allemagne. Elle imagine Robert dans un fossé, la bouche ouverte et se raccroche aux listes d’hommes revenus et publiées chaque jour dans la presse. Et puis un jour de mai, le téléphone sonne. François Mitterrand, alias Morland, lui annonce que Robert L. est vivant, presque mort, mais vivant.
La vie et la mort : le texte de Duras oscille constamment entre ces deux pôles. Tout en connaissant l'issue de la pièce, on reste suspendu au récit de M. qui a tout moment peut basculer. Et c'est toute la force de cette écriture qui fait ressentir l'impuissance de l'attente, l'angoisse de retrouver un homme qui n'existe plus, l'espoir absurde de son retour. Et finalement cette énergie, cette pulsion de vie qui triomphe de tout.
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